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créée le 25 février 2010
TABLEAU d’HONNEUR
Qui était
Fernand TANNAY, soldat au 77ème RI ?
Merci
à Valérie Q., de la Seine-Maritime, grâce à qui nous
avons ouvert cette page.
Avant
le conflit
Ce
récit, étayé par des documents, comporte toutefois
quelques hypothèses ou suppositions. Si vous avez quelques informations,
n'hésitez pas à nous contacter.
Cliquez sur les images pour
les agrandir
Le registre matricule (ci-contre) nous
apprend que Fernand est né le 6 février 1893, à
Trouville-Alliquerville, près de Bolbec (76).
Un anonyme, un sans-grade ; la vie qu'il
découvre ne sera probablement pas facile.
En effet, un faible niveau d'instruction ("niveau
2", c'est-à-dire qu'il sait lire et écrire mais est sous le
niveau d'études primaires) et une petite taille conjuguée
à des insuffisances physiques semblent le destiner à une vie des
plus simples.
De plus, le voilà orphelin de
père et de mère avant que d'être adulte (tous deux sont
décédés en 1912), et trois ans plus tard, c'est sa
sœur Léontine qui disparaît. Voilà beaucoup de poids
pour de frêles épaules.
Alors, simple domestique il sera. Il restera
probablement anonyme et sans grade
toute sa vie mais après tout, peut-être est-il heureux ainsi.
Et qui sait, cette vie sans grand relief,
cette vie uniforme lui vaudra peut-être une vie sans uniforme.
Ça semble en effet devoir être
le cas, puisqu'il est exempté en 1914 ("Ajourné pour
faiblesse", classé dans la 5ème partie de la
liste de recrutement en 1913 et maintenu en 1915).
Quelques
précisions d'époque sur les conditions du recrutement, ici et ici.
Certains étaient partis la fleur au
fusil, d'autres se demandaient ce qu'ils faisaient dans cet enfer, mais lui,
comment ressent-il cette mise en retrait ? Comme une chance ou comme un
déshonneur ?
1916
- 1918
En 1916, la question ne se pose plus car le
voilà classé dans la 1ère partie de la liste de
recrutement. Probable qu'il est alors considéré "bon pour le service" à une
époque où la France a besoin d'hommes au front.
L'ironie du sort veut qu'il soit
recruté au moment où son frère André
vient de tomber. En mai 1916, au Mort-homme, près de Verdun.
Fernand est incorporé le 6 septembre
1916 au 120ème RI. Puis, six mois plus tard (février
1917), il est dirigé au 77ème RI (18ème
division) qu'il ne quittera plus.
Avec ce régiment, il est à
Craonne (Aisne) en début d'année 1917 puis en Lorraine en fin
d'année. Au cours des premiers mois de 1918, on le retrouve dans le sud
de la Somme (bois de Sénécat) et dans l'Oise (Ressons/Matz).
Voir en fin de ce document, les citations reçues par le
régiment pendant cette période.
Juillet
1918 : la 2ème bataille de la Marne
Dans l'après-midi du 16 juillet, le
régiment arrive à Verdon, à 15 km au sud de Dormans.
Le 77ème RI a
déjà "fait la Marne" de façon glorieuse à
Mondement, en septembre 1914. Mais Fernand TANNAY n'a sans doute pas le temps
d'entendre les anciens se souvenir, car les allemands ont
déclenché depuis la veille un déluge de feu et d'acier.
C'est la "friedensturm" pour les allemands, la deuxième
bataille de la Marne pour les alliés (lire
ici).
L'ennemi a passé la Marne en aval de
Dormans et, en une journée, occupe une bande de 5 km de large et 10 km
de long sur la rive sud.
Le
77ème RI, du 16 au 20 juillet
A peine arrivé, le 77ème
RI entre de plein fouet dans la bataille, confronté aux troupes
d'élite de l'armée allemande, la garde impériale.
Extrait de
l'historique du 77ème
RI Carte extraite du JMO de la 18ème
DI |
|
Parcours
du 77ème RI Cliquer
sur la carte pour agrandir le
lieu des combats (carré vert) au format IGN |
Le 77ème RI fait mieux que
défendre le terrain, ce 17 juillet. Après deux jours de
progression, l'ennemi recule enfin. Et les deux jours suivants permettront de consolider
cette position en vue de participer à la contre-offensive
préparée par Foch.
Mais les accrochages sont nombreux autour de la cote 243 pour conserver la
maîtrise des lieux et malgré le soutien des chars, les pertes sont
importantes.
C'est là que Fernand TANNAY tombe
à 4h du matin, ce jeudi 18 juillet, à environ 2 km à
l'ouest de Comblizy ; À la lecture des différents documents, il
est probablement atteint alors que le 77ème progressait de la
ferme des Pozard vers la ferme du clos Milon (ici), occupé à
assurer les positions prises.
Dans les jours qui suivent, il se confirme
que l'ennemi est défait mais il ne recule que pas à pas. Le 24
juillet, le régiment passe la Marne sur des passerelles de barques
à Sauvigny, à 3 km à l'ouest de Dormans, s'illustre une
fois de plus à Chassins (voir citations ci-dessous) puis il quitte la
région le 4 août, laissant des pertes (morts, blessés,
disparus) d'environ 380 soldats.
Nous avons identifiés à ce jour
97 tués.
Un état des pertes est annexé
au JMO en date du 3 août mais non disponible en ligne.
Citations
du 77ème RI
Le régiment avait reçu sa
première citation à
l'ordre de l'armée à Mondement, Marne, dès septembre 1914. Mais c'est
sur la période 1917-1918, où Fernand sert au 77ème
RI, que l'histoire est la plus glorieuse pour le régiment :
En 1917, la 2ème citation
à l'ordre du régiment de l'armée vient saluer son esprit
offensif lors des combats de Craonne[1]
(attaque des courtines, plateau de Californie).
En 1918, le bois de Sénécat
vaut au régiment une 3ème citation à l'ordre de
l'armée et Ressons-sur-Matz une 4ème. Cette
dernière sera remise par le Maréchal Pétain qui le
qualifie de "régiment d'élite" et vaudra au
régiment le port de la fourragère avec couleur de la
médaille militaire.
Puis, les jours qui suivent le
décès de Fernand TANNAY, le régiment s'illustre encore
à Chassins, sur la rive nord de la Marne, récemment reconquise :
Source
: http://www.chtimiste.com
Pour en savoir plus sur le 77ème
RI :
-
Carnets de Léopold
Retailleau, du 77e R.I., 1914-18, tombé le 26 juillet 1918.
Aujourd'hui
|
Source : http://trouville76.free.fr |
Fiche Mémoire des Hommes L'indication sur "Mémoire des
hommes" est erronée. Il n'est pas tombé dans la Meuse mais
dans la Marne. Par contre, la date de décès
est correcte (indiquée au 10 juillet sur le registre matricule) ainsi
que 1913, la classe de recrutement (indiquée à 1915 sur le site
Sépultures de Guerre). |
Trouville-Alliquerville (76) Fernand TANNAY est inscrit au Monument aux
Morts de Trouville-Alliquerville (76). 17 autres soldats l'accompagnent, pour le
1er conflit (un autre a été ajouté pour la
période 1939-45). |
Dormans (51) Nous l'avons vu, entre 1912 et 1918, 5
membres de la famille sont décédés, dont deux à
la guerre (Émile, un autre frère, exempté, est le seul
dont nous retrouvons trace après guerre). Passer rendre hommage à Fernand
TANNAY était le minimum que nous pouvions faire. Le jour où nous sommes passés,
il avait neigé. Fernand repose aujourd'hui à la
Nécropole nationale de Dormans (Voir le
panoramique 360°) où ont été réunis, dans
une même enceinte, 3910 soldats allemands, britanniques et
français. Il occupe la tombe 854, entouré par
38 autres compagnons de régiment tombés en terre de Champagne.
Fernand était
précisément sur cette ligne de front, ce jour-là, et une
de ces bornes, celle de Comblizy, est érigée à moins de 500
m de la cote 243. Fernand TANNAY est probablement tombé juste
derrière le bosquet qui apparait sur cette photo. |
- O O o -
Nous souhaitions rendre ce récit
proche de ce que connu Fernand TANNAY. Mais avant tout, nous avons voulu mettre
en lumière un homme que rien ne destinait à l'être.
Un sans-grade, un anonyme, Fernand TANNAY
était peut-être un oublié de la vie. Aujourd'hui, en nous
intéressant à sa vie, à ses derniers jours, nous lui
rendons hommage, au même titre que les 1.400.000 autres soldats
français tombés au cours de ce conflit (et plus de 8 millions,
tous pays confondus).
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[1] Craonne en mai 1917, c'est aussi pour le régiment la rébellion de quelques-uns de ses hommes en mai (sources diverses, dont http://www.crid1418.org/doc/bdd_cdd/unites/DI18.html, mais pas de trace sur le JMO).